Qu'il s'intéresse aux mystères de l'Afrique, à Mike Tyson ou à la troublante disparue niçoise Agnès Le Roux, Patrick Besson est un écrivain proustien. Il quête le temps perdu, datant ses tristesses tel le Baudelaire de Mon coeur mis à nu. Dans la lignée de 28 boulevard Aristide Briand et Tour Jade, où Besson partait de quelques rues de sa vie pour se rendre « accessible à certaine mélancolie », Come baby laisse la mémoire vagabonder sur le corps des jeunes femmes. Un court roman vrai, en forme de flânerie sur le vif des sentiments, mots précis à l'assaut et à la caresse.
Astrid est une journaliste people blonde, râleuse et sensuelle. Elle a tout pour plaire, sauf ce qui attache – « la désinvolture ? Le désintérêt ? » Alors qu'elle réapparaît à une table du Grand Véfour, Besson se souvient de leur histoire et d'un séjour en Thaïlande pour l'oublier : « On ne devrait pas dire une histoire d'amour mais une histoire, parce que vient toujours le moment où il n'y a plus d'amour. »
Entre l'ours et la poupée, il y eut des voyages de presse, Un parfum de jasmin de Michel Déon, des chambres d'hôtel, l'ombre de Romain Gary, des taxis, la Corse puis le vide des coeurs battus que Besson comblera en regardant en boucle Lady Bar, un téléfilm tourné en Thaïlande.
L'une des actrices - « Pamela Anderson thaï » - l'obsède, se superpose à la silhouette d'Astrid. Besson veut la rencontrer, l'effleurer. Il n'arrivera pas jusqu'à elle, happé par deux adorables prostitués, Aom et Noï, qui habiteront ses nuits dans la chambre 0812 du Shangri La de Bangkok. « Come baby », lui disent-elles avant, pendant, après l'amour. Besson note : « On ne voyage pas en Thaïlande pour assouvir ses besoins sexuels, mais pour voyager dans sa jeunesse avec la faculté de l'arranger à son goût. »
Restent alors l'empreinte douce d'un dernier baiser au petit matin, des billets glissés dans un sac, une photo sexy envoyée par SMS et les peaux mêlées d'Astrid, Aom et Noï. Une certitude, aussi : le plaisir, tarifé ou non, est la petite mort de l'homme de cinquante ans au corps fatigué, à l'esprit détaché des pâles illusions.
Patrick Besson, Come baby, Mille et une nuits, 2011
Article paru dans Service littéraire, avril 2011, sous le titre "Les cons de la rivière Kwaï"
3 commentaires:
Celte vaporeux et salé, tu écris comme une pute qui fait l'amour avec l'homme qu'elle aime.
Tu as beau être sur Paris, toujours, dans tes mots, une odeur d'océan avec ses vagues qui nous racontent les indiens et les soleils rouges.
Des mots qui ne sont pas déplaisants, même si l'anonymat n'est pas un masque apprécié du côté de ces braconnages.
Alors je tombe le masque.
Et là, le visage d'une vieil homme que seul les pies et les rouges gorges de mon jardin reconnaissent et saluent. Sinon, autrefois, on m'appelait Yves.
Bien à toi, pirate lunaire.
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