mardi 27 janvier 2009
Le repos du guerrier
S'endormir au bord de mer
Fin de la terre
en buvant
à la bouteille
du champagne rosé
près d'une demoiselle
qui rirait
quand elle entendrait :
"Quand on n'a pas de fille, rien ne nous empêche de la marier à un éleveur de moutons en Australie"
vendredi 23 janvier 2009
Marc-Edouard Nabe n'est pas mort
Il y a, depuis vingt-cinq ans, un «scandale» Nabe. Quel que soit le genre qu’il aborde – roman, essai, pamphlet, tome de son Journal intime ou recueil de poèmes –, les fielleux lui collent les plus infamantes étiquettes ou, tout aussi efficace, se taisent. Leur excuse : Nabe s’est grillé tout seul, avec Au régal des vermines. En 1985, il entre en littérature avec la classe tonitruante d’un feu follet kamikaze. Dans une langue qui doit autant au swing de Thelonious Monk qu’à l’uppercut de Mohammed Ali, il règle ses comptes. Noirs, Juifs, Arabes, petits blancs aigris, sans oublier les femmes et les enfants : chacun en prend pour son grade. Sur le plateau de Bernard Pivot, il enfonce le clou. Ses auteurs de chevets se nomment Céline, de Roux ou Rebatet. Les physionomistes des lettres ajoutent qu’il portait, ce jour-là, un costume et des lunettes rondes, tendance Brasillach. Nabe était donc antisémite, néofasciste, quasi nazi.
La beauté d’un ratage
Dans Le vingt-septième livre, préface à la réédition du Régal republiée en un mince volume, Nabe se souvient de ce qu’il appelle sa «casserole» et d’une époque où «être juste considéré comme non socialiste t’empêchait d’avoir la plus petite visibilité médiatique.» Le vingt-septième livre est une merveille de confession au couteau, où les masques sont découpés, à vif : «Je suis un loser, ce qu’on appelle un écrivain à insuccès, un worst-seller … J’ai complètement raté mon destin d’écrivain. J’ai écrit vingt-six livres totalement inutiles : personne ne les a lus, ou si peu. Flops sur flops.»
La beauté d’un ratage
Dans Le vingt-septième livre, préface à la réédition du Régal republiée en un mince volume, Nabe se souvient de ce qu’il appelle sa «casserole» et d’une époque où «être juste considéré comme non socialiste t’empêchait d’avoir la plus petite visibilité médiatique.» Le vingt-septième livre est une merveille de confession au couteau, où les masques sont découpés, à vif : «Je suis un loser, ce qu’on appelle un écrivain à insuccès, un worst-seller … J’ai complètement raté mon destin d’écrivain. J’ai écrit vingt-six livres totalement inutiles : personne ne les a lus, ou si peu. Flops sur flops.»
Pour raconter son naufrage, Nabe s’est choisi un interlocuteur privilégié : Michel Houellebecq dont il tire, entre tendresse et vacheries, le plus juste des portraits. L’auteur des Particules élémentaires fut son voisin d’immeuble, dans le XVe arrondissement de Paris. Lorsqu’ils descendaient ensemble leurs poubelles, Houellebecq disait à Nabe : «Si tu veux avoir des lecteurs, mets-toi à leur niveau ! Fais de toi un personnage aussi plat, flou, médiocre, moche et honteux que lui. C’est le secret, Marc-Edouard. Toi, tu veux trop soulever le lecteur de terre, l’emporter dans les cieux de ton fol amour de la vie et des hommes ! ...»
L’art ne rend pas les armes
Quand Nabe se regarde dans le miroir du temps passé, il voit Houellebecq, c’est-à-dire une drôle d’image trafiquée donnant, avec exactitude, la température de l’heure : «Il y a celui qui a tellement l’air mort qu’on lui fait un triomphe de son vivant ; et celui qui est tellement vivant qu’on fait comme s’il était mort.»
L’art ne rend pas les armes
Quand Nabe se regarde dans le miroir du temps passé, il voit Houellebecq, c’est-à-dire une drôle d’image trafiquée donnant, avec exactitude, la température de l’heure : «Il y a celui qui a tellement l’air mort qu’on lui fait un triomphe de son vivant ; et celui qui est tellement vivant qu’on fait comme s’il était mort.»
Laissons les morts épinglés dans Le vingt-septième livre, et regardons du côté des vivants où virevoltent des silhouettes inoubliables : une belle Hélène aux yeux pers et son fils Alexandre, Jean-Edern Hallier aux commandes de L’idiot international, Marcel Zannini et sa clarinette, des jazzmen qui, grâce à une poignée de notes, nous réconcilient avec l’immonde et nous donnent la clé des mots de Nabe. Il écrit comme jouaient Albert Ayler ou Django Reinhardt : avec la grâce fragile de l’excès. Pour achever de s’en convaincre : il faut relire d’urgence La Marseillaise et Nuages, deux solos étincelants où les corps musicaux des artistes sont la cheville ouvrière de leur art.
Marc-Edouard Nabe, Le vingt-septième livre, Le Dilettante, 93 p ; La Marseillaise, Le Dilettante, 48 p ; Nuages, Le Dilettante, 64 p.
Article paru dans l'Opinion indépendante le 23 Janvier 2009
Article paru dans l'Opinion indépendante le 23 Janvier 2009
jeudi 22 janvier 2009
dimanche 18 janvier 2009
La jeune fille de Manhattan
La jeune fille de Manhattan arrive toujours quand on ne l'attend plus. Exquise tête brune aux yeux rieurs où s'allonger, aux lèvres peintes par le plus coquin des dieux.
La jeune fille de Manhattan porte une robe courte qui révèle des jambes d'héroïne de la nuit, perfection du galbe, fragilité de porcelaine des chevilles.
La jeune fille de Manhattan aime qu'on la regarde. Elle aime aussi le champagne et les vodka-orange, les cigarettes américaines, la douceur et la violence. Elle parle de suicide en souriant, de l'amour avec le zest d'angoisse qu'ont celles qui y croient encore. Elle cherche des passions, oubliant que la mélancolie est son bien le plus précieux, avec son rire d'après minuit, son art de dompter l'asphalte et la caresse de ses mains.
La jeune fille de Manhattan est insomniaque. Elle ne ferme les yeux que quand un garçon de passage l'embrasse. Histoire de tutoyer quelques étoiles venues d'ailleurs pour lui caresser le cou. L'homme de sa vie s'appelait Romain Gary : il est mort, hante quelques lieux où les bulles sont à la fête.
La jeune fille de Manhattan est, quand elle s'enfuit, une promesse de l'aube.
La jeune fille de Manhattan porte une robe courte qui révèle des jambes d'héroïne de la nuit, perfection du galbe, fragilité de porcelaine des chevilles.
La jeune fille de Manhattan aime qu'on la regarde. Elle aime aussi le champagne et les vodka-orange, les cigarettes américaines, la douceur et la violence. Elle parle de suicide en souriant, de l'amour avec le zest d'angoisse qu'ont celles qui y croient encore. Elle cherche des passions, oubliant que la mélancolie est son bien le plus précieux, avec son rire d'après minuit, son art de dompter l'asphalte et la caresse de ses mains.
La jeune fille de Manhattan est insomniaque. Elle ne ferme les yeux que quand un garçon de passage l'embrasse. Histoire de tutoyer quelques étoiles venues d'ailleurs pour lui caresser le cou. L'homme de sa vie s'appelait Romain Gary : il est mort, hante quelques lieux où les bulles sont à la fête.
La jeune fille de Manhattan est, quand elle s'enfuit, une promesse de l'aube.
Remember Patrick Mc Goohan
J.J. Abrams n’a rien inventé avec Lost. Ses héros, égarés sur une île mystérieuse et hostile, sont les lointains héritiers des habitants du « Village » du Prisonnier (The prisonner) créé par George Markstein et Patrick Mc Goohan en 1967.
Mc Goohan – dandy sévère qui apparaît dans quatre Columbo dont il réalisera, par ailleurs, un épisode – y incarnait un agent secret démissionnaire brutalement projeté dans un lieu ressemblant fort au territoire régenté par Big brother dans 1984 de Georges Orwell. A l’intérieur de ce « cauchemar climatisé », l’homme n’est plus que le souvenir de ce qu’il était. D’un côté : des villageois numérotés n’ayant le choix qu’entre avouer, donner « des renseignements », ou s’évader de la forteresse. De l’autre : des geôliers qui tirent les ficelles de la manipulation.
Série culte, Le prisonnier est une fascinante plongée dans ce que Baudouin de Bodinat appelle « le peu d’avenir que contient le temps où nous sommes ».
Résonne désormais, alors que Mc Goohan s'est fait la malle, l’amère réplique de Numéro 6 – le personnage qu'il interprétait : « Je ne suis pas un numéro, je suis un homme libre ».
Notice - légèrement modifiée - publiée, été 2008, dan l'Opinion indépendante.
mardi 13 janvier 2009
Marignac is back - le 15/01/09
Dans 2 jours, ça va cogner à la Série Noire : Marignac monte sur le ring !
Renegade Boxing club.
On en reparlera.
En attendant, un tour sur le blogue du bouquin : http://renegadeboxingclub.wordpress.com/
Une Itv mise au poing de l'ami Thierry : http://www.bibliosurf.com/Interview-de-Thierry-Marigna
Un extrait, comme un premier verre pour la route :
« Il accrocha le bras du Français pour lui coller sous le nez un DVD : Black Ghetto Booty, en grosses lettres gothiques couleur chocolat. Dessaignes fit mine de s’intéresser une fraction de seconde aux magistrales paires de miches afro-américaines qui s’étalaient sur la jaquette dans toute leur gloire primitive. Simultanément, le Français lui saisissait le poignet par en-dessous, une prise solide. Il tira sèchement vers la droite. Le petit homme fit un quart de tour involontaire et le mouvement interrompit net son boniment:
—Du cul noir, mec, sans soutif, sans culotte, du cul noir… Eh, doucement, mec, excuse-moi si je t’ai fait peur… Du cul noir…
Il lui fallut décrire un tour complet pour se retourner vers Dessaignes, déjà deux pas en avant et il n’insista pas, il avait déjà repéré un autre chaland sur le trottoir d’en face. »
Renegade Boxing club.
On en reparlera.
En attendant, un tour sur le blogue du bouquin : http://renegadeboxingclub.wordpress.com/
Une Itv mise au poing de l'ami Thierry : http://www.bibliosurf.com/Interview-de-Thierry-Marigna
Un extrait, comme un premier verre pour la route :
« Il accrocha le bras du Français pour lui coller sous le nez un DVD : Black Ghetto Booty, en grosses lettres gothiques couleur chocolat. Dessaignes fit mine de s’intéresser une fraction de seconde aux magistrales paires de miches afro-américaines qui s’étalaient sur la jaquette dans toute leur gloire primitive. Simultanément, le Français lui saisissait le poignet par en-dessous, une prise solide. Il tira sèchement vers la droite. Le petit homme fit un quart de tour involontaire et le mouvement interrompit net son boniment:
—Du cul noir, mec, sans soutif, sans culotte, du cul noir… Eh, doucement, mec, excuse-moi si je t’ai fait peur… Du cul noir…
Il lui fallut décrire un tour complet pour se retourner vers Dessaignes, déjà deux pas en avant et il n’insista pas, il avait déjà repéré un autre chaland sur le trottoir d’en face. »
mardi 6 janvier 2009
Monplaisir 2009
Dériver dans le froid d'une ville plein ouest, là où les pêcheurs caillassaient ferme.
Rivaliser de fusées, avec mon ami Sérafini, sur les décombres du Nouveau monde.
Me faire traiter, moi le pur plouc Breton, de "Titi parisien" par une jolie fille au nom de ville en flamme.
La perruque rose de David, diable en chef.
Finir à 4 heures du matin dans un bistrot "ouvert la nuit", un 3 janvier, au milieu des bouteilles de champagne, avec le camarade Roberti et un Pédé black de belle tenue.
Le panama de Paulin'ho, compère hors-pair.
Les nouvelles "sur commande" de Jérôme Leroy.
Les cigarettes qui, avec grâce et lenteur, auront la peau de ma gorge.
La peau de ma muse.
La beauté de ma muse touchant la beauté d'Ivone.
Voir La Chotte derrière ses platines vinyles.
Paul Gégauff encore.
Le moteur d'une voiture noyé dans le givre.
Le souffle de ma musette dans son lit.
La bouteille de Cheverny partagée avec Christian Authier.
Tous les livres de Jean-Pierre Martinet.
Se souvenir, enfin, du monde d'avant.
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