Monica Sabolo
Elle
a
reçu
le
prix
de
Flore
pour
Tout
cela
n’a
rien
à
voir
avec
moi.
C’était
mérité.
Monica
a
écrit
le
meilleur
roman
de
la
rentrée.
On
lui
aurait
donné
le
Goncourt,
le
Renaudot
et
l’Académie
française.
Elle
les
aura
plus
tard.
Quand
elle
attendait,
en
fumant
une
Vogue,
que
Frédéric
Beigbeder,
président
du
jury,
lui
remette
son
prix,
son
chèque
et
un
verre
de
Pouilly-fumé
gravé
à
son
nom,
on
a
trouvé
qu’elle
ressemblait
à
Françoise
Sagan,
époque
Bonjour
tristesse
– le
roman
et
le
film
de
Preminger.
Nous
avions
une
photo
précise
en
tête,
signée
Georges
Dudognon :
même
cheveux
blonds
coupés
courts,
même
air
lunaire,
même
sourire
presque
timide,
même
silhouette
gracile.
Un
écho
visuel,
finalement,
du
style
de
Monica
Sabolo.
Pas
étonnant
que,
dans
Tout
cela
n’a
rien
à
voir
avec
moi,
beau
roman
d’amour,
de
chagrin
et
d’étincelles,
l’héroïne
– initiales
MS
-
envoie
des
lettres
à
Frédéric
Berthet.
Entre
feux
follets,
les
affinités
sont
électives.
Franck
Maubert
De
son
premier
roman
– Est-ce
bien
la
nuit?-
jusqu’à
Gainsbourg
à
rebours,
publié
aux
Mille
et
une
nuits,
Franck
Maubert
se
joue
des
genres.
Revenu
de
tout,
de
la
télévision
notamment,
il
tient
sa
ligne
de
mots,
tel
un
pêcheur
élégant
et
mélancolique.
On
retrouve
dans
sa
flânerie
sur
les
pas
artistiques
du
« beau
Serge »,
les
« Stations
Gainsbourg »,
ce
que
nous
avions
aimé
dans
Le
dernier
modèle
– prix
Renaudot
Essai
2012
– et
dans
Ville
close,
enquête
modianesque
entre
les
murs
de
Richelieu :
la
grâce
d’une
plume
légère
et
profonde.
Maubert
observe,
écoute,
se
balade,
trinque,
esquisse
le
contour
des
âmes
et
des
lieux.
Puis
il
pose
avec
délicatesse
les
émotions,
mêlant
les
siennes
et
celles
de
ses
personnages,
sur
le
papier.
Dans
Gainsbourg
à
rebours,
on
boit
des
piscines
de
Dom
P.
Les
trois
B.
(Bardot,
Birkin,
Bambou)
hantent
chaque
page.
Les
mélodies
ont
une
sacrée
gueule
d’atmosphère ;
les
paroles
touchent
plein
coeur.
Gainsbarre
se
pointe,
avant
de
filer
pour
laisser
place
à
un
musée
imaginaire.
Une
époque
est
retrouvée,
et
suspendue
au
trapèze
du
temps.
Aux
dernières
nouvelles,
Maubert
serait
en
Touraine,
entouré
d’arbres
et
de
belles
quilles.
Il
écrit
un
roman,
qu’il
nous
tarde
de
lire,
autour
de
la
vie,
de
l’oeuvre
et
de
la
mort
de
Robert
Malaval.
Guillaume
Serp
Longtemps,
on
s’est
dit
qu’il
fallait
rééditer
Les
chérubins
électriques,
unique
roman
de
Guillaume
Serp,
alias
Guillaume
Israel,
écrivain,
chanteur,
dandy,
parolier,
mort
en
1987.
Il
était
le
leader
de
Modern
Guy.
Beigbeder
le
citait
dans
Vacances
dans
le
coma.
Thierry
Marignac,
homme
en
colère
et
de
haute
qualité,
nous
en
avait
parlé
en
évoquant
son
Paris
de
la
fin
des
seventies.
La
première
phrase
du
roman
donne
le
ton :
«
Cassandre
jouait
avec
le
zip
de
son
pantalon.
Elle
m’attendait
seule
à
la
terrasse
du
Flore
et
plongeait
parfois
ses
lèvres
dans
un
coca-fraise,
sans
doute
rêvait-elle
d’être
Marilyn
Monroe.
»
Tout
ce
que
nous
aimons.
Tout
ce
qu’aime
aussi
Jean-Christophe
Napias,
tête
pensante
et
âme
damnée
de
l’Editeur
singulier,
maison
classieuse
qui
vient
de
republier
Les
Chérubins
électriques.
La
couverture,
très
pop
art,
est
extra ;
la
préface
d’Alexandre
Fillon
nous
éclaire
sur
Serp,
sur
le
naufrage
pailleté
des
années
80.
Le
texte,
lui,
possède
toujours
le
charme
d’un
éternel
jeune
homme
enfui
trop
tôt.
Littérature
pas
morte :
faites
passer...
Claire
Debru
Nous
ne
savons
pas
si
Claire
Debru
aime
Monica
Sabolo,
Franck
Maubert
et
Les
Chérubins
électriques
de
Guillaume
Serp.
On
peut
le
penser :
Claire
est
une
jeune
femme
au
goût
exquis.
Editrice,
chez
Nil,
de
la
collection
« Les
affranchis »,
elle
accueille
les
meilleures
plumes
du
jour.
Récemment,
Giulio
Minghini
qui,
avec
Tyrannicide,
s’est
attiré
les
foudres
de
la
mamie
du
Monde
des
livres,
Josyane
Savigneau.
Josie
n’apprécie
guère,
il
est
vrai,
qu’on
taquine
Philippe
Sollers.
Claire
lui
a
répondu
dans
une
lettre,
telle
une
coupe
de
Drappier
Zéro
dosage
jetée
au
visage,
pratique
que
Savigneau
connaît
bien.
Quand
elle
écrit,
Debru
est
toujours
une
jeune
femme
de
goût.
La
preuve :
l’ouvrage
qu’elle
consacre,
avec
Marc
Cerisuelo,
aux
frères
Coen.
C’est
titré
Oh
Brothers
et
c’est
publié
chez
Capricci,
enseigne
très
sérieuse
à
laquelle
elle
offre
un
grain
de
folie.
Mais
ce
n’est
pas
tout.
Claire
a
créé,
en
2012,
le
plus
drôle
des
prix
littéraires :
le
prix
de
la
page
112.
Il
sera
remis
le
26
novembre.
Parmi
les
huit
finalistes
sélectionnés
par
un
jury
où
l’on
retrouve
notre
ami
Roland
Jaccard,
Grégoire
Bouillier
ou
Pierre-Guillaume
de
Roux,
nous
avons
nos
préférences :
Dominique
Noguez-
Une
année
qui
commence
bien
-,
Pierre
Lamalattie
– Précipitations
en
milieu
acide
– et
Marianne
Vic
– Les
Mutilés.
Si
nous
en
étions,
nous
voterions
sûrement,
in
fine,
pour
Noguez.
Une
affaire
à
suivre.
Jean
Le
Gall
New
York,
pour
nous,
c’était
la
ville
des
textes
de
Jay
McInerney.
On
pense
à
ses
romans
Bright
Lights,
Big
City
et
La
Belle
vie,
mais
aussi,
dernièrement,
à
Bacchus
et
moi,
recueil
de
chroniques
affirmant
sa
passion
des
vins,
qu’il
compare
tantôt
à
Kate
Moss,
tantôt
à
Grace
Kelly,
sans
oublier
Milla
Jovovich.
Un
plaisir
de
lecture,
qui
donne
envie
de
boire
les
meilleurs
bouteilles.
On
pense,
là,
à
un
champagne
de
la
maison
Selosse.
New
York,
aujourd’hui,
c’est
aussi
le
très
bon
roman
de
Jean
Le
Gall :
New
York
sous
l’occupation,
un
des
premiers
titres
édité
par
Eleonore
de
la
Grandière
chez
Daphnis
et
Chloé.
Avocat
d’affaires
défroqué,
éditeur
lui-même
chez
Séguier
et
Atlantica,
Le
Gall
est
un
dandy
qui
aime
la
bonne
chère,
les
jolies
filles
et
les
histoires
troussées
avec
élégance.
D’une
langue
précieuse
et
précise,
il
nous
raconte
les
aventures
de
Sacha,
Frédérick
et
Zelda,
trois
trentenaires
à
l’assaut
et
à
la
caresse
de
la
« Grande
Pomme ».
Problème :
nous
sommes
en
2007,
en
pleine
crise
des
Subprimes.
La
violence
va
enlacer
les
plaisirs
fânés
de
la
vie.
New
York
sous
l’occupation :
une
manière
d’Oscar
et
les
femmes
de
Limonov
revisité
par
un
Paul-Jean
Toulet
du
nouveau
siècle.
Le
Gall,
en
effet,
est
un
godelureau
du
sud-ouest
qui
connaît
ses
classiques.
JFK
John
Fitzgerald
Kennedy
a
été
assassiné
à
Dallas,
il
y
a
cinquante
ans,
le
22
novembre
1963.
Tout
a
été
dit,
écrit
et
filmé
sur
ce
jour
maudit
pour
l’Amérique.On
garde
en
mémoire
le
film
d’Oliver
Stone,
une
série
trop
sérieuse
avec
la
charmante
Katie
Holmes
ou
les
romans
d’Ellroy
et
de
Norman
Mailer.
On
en
veut,
pourtant,
encore.
Il
faut
lire,
d’urgence
et
à
la
suite,
John
Fitzgerald
Kennedy
de
Fédéric
Martinez,
chez
Perrin,
et
JFK,
le
dernier
jour
de
François
Forestier,
chez
Albin
Michel.
Les
deux
ouvrages
se
complètent.
Frédéric
Martinez
– dont
on
n’oublie
pas
la
balade
biographique
autour
de
Toulet
et
le
Petit
éloge
des
vacances
– nous
parle
de
la
vie
de
Kennedy
et
de
sa
famille.
Rien
ne
manque :
il
y
a
le
père,
les
frères,
les
coups
tordus,
le
sexe,
la
mafia,
la
dégueulasserie,
le
génie
politique.
C’est
sérieux,
documenté,
avec
des
zestes
d’éclats
de
plume
qui
nous
emmènent
jusqu’à
la
mort
de
JFK.
La
mort
de
Kennedy,
François
Forestier
en
fait
son
affaire,
comme
il
s’était
emparé
de
Marlon
Brando
dans
une
biographie
au
couteau.
Seconde
après
seconde,
on
revit
le
drame,
avant,
pendant,
après.
Nous
sommes
l’ombre
de
JFK.
Les
dialogues
fusent.
Le
Texas
flamboie
de
haine.
La
peur
apparaît.
Forestier,
grand
écrivain
de
nos
mythologies,
a
tout
réussi :
de
la
première
ligne
à
la
dernière
balle.
Victoria
Olloqui
Dans
Lui,
Victoria
– qu’on
peut
voir
dans
les
salles
obscures
au
générique
de
Les
garçons
et
Guillaume,
à
table !
de
Guillaume
Gallienne
– prend
la
pose.
Shootée
sur
huit
pages
par
Olivier
Zahm,
elle
se
dévoile
et
se
révèle.
C’est
un
enchantement.
Elle
porte
une
nuisette
en
dentelle
et
tulle,
signée
Agent
Provocateur,
dont
la
bretelle
gauche
glisse.
Les
bas
en
nylon
rouge,
de
chez
Wolford,
pare
à
ravir
ses
jambes
très
joliment
dessinées.
Aux
pieds :
des
escarpins
noirs
créés
par
Giuseppe
Zanotti,
Louboutin
et
Hermès ;
des
escarpins
blancs
made
in
Pierre
Hardy.
Nue,
dans
l’embrasure
d’une
porte,
elle
attire
toute
la
lumière.
On
ne
se
lasse
pas
de
Victoria
et
on
se
souvient
que,
il
y
a
quelques
années,
elle
chantait
des
chansons
légères
comme
un
été
qui
ne
finirait
pas.
Son
groupe
s’appelait
Les
Chanteuses.
En
bikini,
sur
des
paroles
d’Octave
Parango,
elle
nous
intimait
l’ordre
de
secouer
nos
têtes
et
nous
mettait
en
garde :
« C’est
la
guerre
/
Ce
soir
tous
les
mecs
vont
prendre
cher
/
On
n’a
pas
de
casque
sur
notre
scooter
/
On
a
failli
prendre
le
RER
/
Mais
on
est
descendues
à
Maubert »
On
va
réécouter
le
CD
sans
omettre,
toujours,
de
prendre
garde
à
la
douceur
des
choses.
Texte paru sur Causeur.fr, novembre 2013
Photo : Olivier Zahm in Lui #3