mercredi 23 décembre 2009

Jean-Marc Parisis parle de Paul Gégauff, Tous mes amis, dans le Figaro magazine ...


"Le spectateur, qui se soucie du nom des scénaristes comme de son premier pop-corn, n'a sans doute jamais entendu parler de Paul Gégauff. Celui qui écrivit une quinzaine de films pour Chabrol se pommade malicieusement dans une réplique de Que la bête meure : «Nathalie Sarraute, Butor, Robbe-Grillet, même Gégauff, on aime ou on n'aime pas, mais ça va quand même loin.» Façon de rappeler qu'il avait débuté par quatre fictions, aux Editions de Minuit, dans les années 50. Moins nouveau roman que nouvelle vague, Gégauff travailla aussi pour Rohmer (Le Signe du lion), Clément (Plein soleil), Godard (Week-End) ou Barbet Schroeder (More). Le cinéma comme planche à billets, la littérature comme danseuse. De lui, on réédite Tous mes amis, des nouvelles drôles et noirâtres parues en 1969, préfacées à la hussarde par Arnaud Le Guern. On s'y envoie des crêpes flambées et du rhum rose, on passe de l'Eure à Papeete ; les feux follets Maurice Ronet et Christian Marquand sont cités. Roger Nimier vantait, chez l'animal, «un style vif où la pensée saute d'un mot à l'autre comme une puce» ; il avait raison. Provocateur, mufle, étincelant, royal au bar, Gégauff restera comme «le Brian Jones de la nouvelle vague» (dixit Bernadette Lafont). Plus grand que la vie, il se foutait de tout. «Tue-moi si tu veux, mais ne m'emmerde pas !», avait-il balancé, un jour, à sa dernière femme, de trente-cinq ans sa cadette. En 1983, elle lui mit trois coups de couteau fatals. Gégauff est mort en Norvège, une nuit de Noël, à 61 ans. Le spectateur est prié de s'en souvenir."

lundi 21 décembre 2009

Lettre d'amour


Dans tes mots tendres qui se posent sur la silhouette lointaine de ton grand-père,
Devant un film gore qui ne fait même pas peur,
Dans la folie douce des verres de vodka,
à Berlin, sur les zincs de Paris XIVe ou sur le sable froid de la mer du Nord,
Dans l'esquisse des rires et des baisers de tes 17 ans,
Dans l'accélération de ton souffle quand mes lèvres s'emparent de ta nuque, de tes épaules, de tes seins,
Dans ta mélancolie qui, avant de cogner, éloigne les tempêtes de mon crâne,
Dans ton art féerique et surréaliste de l'amour fou,
Dans la grâce nue qui, sous l'eau brûlante, te pare et met l'eau à la bouche de toutes les envies,
Dans tes moqueries acérées qui défigurent le laid, la bêtise crasse et Nico le petit et sbires associés,
Dans tes sourires quand je parle de Paul Gégauff, de Claude Sautet et de la couleur des années 70,
Dans l'éclat si précieux de tes yeux, around midnight et quand l'aube caresse les peaux,
Dans les mille et une autres choses de cette vie que nous matadorons,
Je t'aime,
mademoiselle,
Je t'aime,
plein soleil de juillet,
dans l'écume d'automne,
sous la neige des singes en hiver,
Je t'aime,
à tombeau ouvert,
le coeur battant.